Alors que l’on pensait les tensions autour de la fiscalité des entreprises retombées, une nouvelle décision du gouvernement vient relancer le débat. Passée presque inaperçue en janvier, cette mesure fiscale inédite pourrait bien rebattre les cartes pour de nombreuses sociétés françaises.
Entre les besoins de financement des régions et les inquiétudes des employeurs, la réforme ne fait pas l’unanimité. Elle soulève de vraies questions : quel impact concret sur les finances des entreprises ? Et pourquoi son adoption a-t-elle même semé le trouble au sein de l’exécutif ?
La genèse d’une réforme controversée
Inscrite dans le projet de loi de finances 2025, la taxe mobilité régionale trouve son origine dans un amendement sénatorial de décembre 2024. Initialement rejetée par Michel Barnier, elle a été réintroduite par François Bayrou lors des ultimes arbitrages budgétaires. Son objectif affiché : doter les régions de ressources pérennes pour moderniser les réseaux de transport (TER, cars scolaires, infrastructures cyclables).
Un calendrier serré a marqué son adoption :
- 15 décembre 2024 : Proposition initiale des sénateurs
- 10 janvier 2025 : Retrait temporaire après l’opposition d’Éric Lombard
- 31 janvier 2025 : Validation en CMP malgré les réserves
Fonctionnement de la taxe mobilité régionale
Contrairement aux impôts existants comme la CVAE ou la CFE, cette contribution cible spécifiquement les entreprises de 11 salariés et plus. Son assiette repose sur 0,15 % de la masse salariale brute, avec un prélèvement effectif dès janvier 2026. Les fonds collectés seront intégralement fléchés vers :
- L’entretien des gares régionales
- Le déploiement de bus à hydrogène
- Les subventions aux abonnements jeunes
Comparatif des versements mobilité
Critères | Ancien dispositif (2019) | Nouvelle taxe 2025 |
Bénéficiaire | Communes > 10 000 habitants | Régions |
Assiette | 1,5 % de la masse salariale | 0,15 % |
Exonérations | PME < 50 salariés | Aucune |
Périodicité | Annuelle | Mensuelle via DSN |
Un contexte économique inflammable
Alors que 63 % des dirigeants dénoncent déjà le poids des cotisations sociales, cette taxe intervient à contre-courant des demandes patronales. L’U2P chiffre son impact à 900 M€ annuels pour les TPE-PME, soit l’équivalent de 15 000 emplois non créés. Pourtant, le gouvernement justifie ce choix par :
- L’urgence écologique des transports
- La baisse historique des dotations de l’État (-12 % depuis 2022)
- Les engagements européens sur les mobilités durables
Mode de déclaration : Ce qui change concrètement
Dès octobre 2025, les services comptables devront intégrer cette nouvelle ligne à leur DSN mensuelle. Une complexité technique non négligeable, selon l’Ordre des experts-comptables : « Cela nécessite une refonte des logiciels de paie pour 78 % de nos adhérents », alerte sa présidente.
Les régions disposeront quant à elles d’une marge de manœuvre inédite :
- Modulation du taux jusqu’à +0,05 % pour les zones rurales
- Possibilité d’affecter 30 % des recettes à l’innovation ferroviaire
Les zones d’ombre de la réforme
Si Bercy promet un bilan d’étape en 2027, plusieurs inconnues persistent. La CPME souligne le risque de double imposition pour les entreprises situées dans des métropoles déjà soumises au versement mobilité. Autre sujet épineux : l’absence de plafond pour les groupes internationaux, dont le siège social échappe souvent au prélèvement.
Une réforme à hauts risques
La taxe mobilité régionale 2025 cristallise les contradictions d’une fiscalité locale en quête de ressources. Entre nécessités écologiques et réalité économique, son succès dépendra de sa mise en œuvre concrète. Les prochains mois révéleront si cet impôt parvient à concilier financement des transports et acceptabilité entrepreneuriale – ou s’il deviendra le nouveau symbole des tensions État-entreprises.